J103 : ascension du volcan Imbabura : 4630 mètres, j’ai pleuré…

Oui, j’ai pleuré, pour la première fois en atteignant un sommet j’ai pleuré, d’émotion, de joie, une personne a su resacraliser la montagne à mes yeux, et le mot n’est pas trop fort, car pour cette communauté indigène la terre est sacrée, et le volcan est Dieu…

Jeudi 5 mai 2011

Alors voilà, bien sûr qu’en allant dans cette communauté Quetchua j’avais une petite idée derrière la tête… Deux grands volcans dominent la ville d’Otavalo : le volcan Cotatacachi et le volcan Imbabura, la légende dit que quand Mama Cotatacachi se recouvre de neige c’est que Tatia Imbabura lui a rendu visite durant la nuit. Mama Cotacachi darde dans le ciel ses pics acérés et enneigés, Mama Coatacachi m’a un peu fait peur, Tatia Imbabura semblait plus doux… Oui, vu d’Otavalo, heureusement je n’ai pas lu tout ce qu’ils disent dans le guide, vu qu’ils disent que l’ascension  est très difficile…

Ne sachant les difficultés, je cherche sur internet l’itinéraire pour atteindre ce sommet et tout à fait par hasard je tombe sur le site internet de la communauté de San Clemente qui pratique l’écotourisme et organise aussi des treks ( les treks ne sont pas leur objectif principal). Mon problème est que pour aller à San Clemente cela necessite que je retourne sur mes pas, et je n’aime pas cela. Allez pas grave, je prends un bus pour Ibarra, de là un taxi jusque San clemente puis 5 minutes de marche à pied et je crois que le Dieu Imbabura a guidé mes pas vers cette famille exceptionnelle qui m’a accueillie comme si j’étais de leur famille. Raoul qui aime sa terre et vénère les Dieux volcans a guidé mes pas avec joie, bonheur, partage et spiritualité…

Mais on ne va pas comme cela au sommet du Volcan Imbabura, avant il faut :

Saluer l’abuela qui a 84 petits-enfants, des arrières-petits enfants et des arrière-arrière petits enfants

Il faut manger le Cui, oui c’est la tradition et en plus c’est bon

Il faut apprendre à reconnaître quelques plantes médicinales

Admirer les fleurs

Dire bonsoir aux taureaux

Et aux vigognes bien sûr

Se recueillir près de la cascade sacrée

Se mettre sous la protection des Cieux

Après une bonne nuit de repos il faudra se lever avant l’aube, prendre un petit déjeuner aussi solide que délicieux (pour Cyril ça déchire)

Puis monter dans un drôle d’engin (dans le truc à bestiaux bien sûr) où tu vas d’abord regretter d’avoir réfuté le cheval pour ménager ton dos, car là tu te tiens sur un pied et toutes les secondes tu as le dos déchiré et la cruralgie qui te tue, en plus tu te gèles à mort, en plus tu dois sans cesse baisser la tête pour ne pas te faire décapiter, mais ces épreuves sont initiatiques… Tu es tellement contente que ça s’arrête que tu es prête à tous les sacrifices…

Tu vas ensuite dire bonjour au soleil…

Puis tu vas marcher, marcher, marcher longtemps, d’abord dans un terrain raide et herbeux

Tu pourras admirer au loin le volcan Cayambe (l’amant du volcan Catatacachi, impressionnant, majestueux, recouvert de neige)

Tu vas admirer le cratère (ouf tu ne sais pas encore que tu vas devoir en escalader une de ses lèvres)

Après une longue et raide marche tu pourras un peu te reposer à 4200 mètres

Sans t’arrêter tu dépasseras le jardin enchanté

Oui, il faut passer à l’attaque…

 Ne pas craindre le brouillard…

Et pour atteindre le sommet tu vas devoir escalader les lèvres du cratère… (ça tu savais pas…), t’es au dessus de 4200 mètres, il fait très froid, le vent souffle très fort, à gauche 1000 mètres de vide, à droite mille mètres de vide, les nuages t’ont rattrapée…

 L’escalade n’est techniquement pas très difficile, sauf sur 1  mètre 50, mais escalade quand même il y a. Ton guide est là, ton guide t’insuffle son énergie, sa joie, sa tranquilité, son amour du volcan, et plus encore, il est à ton écoute, jamais ne te découragera, il te tendra la main quand il le faudra, il assurera ton pied quand il le faudra… 

 A un moment tu sentiras tes muscles de la cuisse droite très très limites, alors tu feras attention de ne pas avoir de geste saccadé, d’escalader petit pas à petit pas, bien chercher les prises, calmement, lentement, une seconde tu vas te demander si tu n’as pas voulu aller trop loin, ce qu’il va se passer si tu te paralyses, mais en gérant à l’économie ça va passer, tu vas regretter de ne pas avoir pris ton pantalon coupe vent, mais ça passe…

Et puis viendra le sommet… Tu vas pleurer dans les bras de ton guide… D’émotion, de joie, consciente que tu viens de vivre quelque chose d’exceptionnel, de sacré  et qui restera à jamais gravé dans ton coeur…

Tu n’as pas le moindre petit mal des montagnes, ni mal à la tête, ni nausées, rien, juste tu devras quand même attendre 5 ou 10 minutes avant de déguster les sandwichs préparés avec amour par Nancy.

Au sommet te rejoindra un jeune d’une communauté voisine. Il monte là pour la première fois, seul, sans boire ni manger, sur son dos sa guitare, il vient à la rencontre du Dieu Imbabura recueillir un peu de son énergie pour la transmettre dans sa musique…

Et peu importe que les nuages cachent le sommet… Tout est tellemment ailleurs…

Viendra la très très longue descente (2200 mètres de dénivelée) mais tu pourras admirer les drôles de plantes qui sont le régal des ours…

Tu essaieras le moelleux de la mousse…

Le lendemain une vieille abuela viendra te masser

Et puis tu vas partir…

Merci Raoul, merci Nancy, merci Maria-Pastola, merci Eddy, merci l’abuela masseuse, merci la communauté de San Clemente, merci de m’avoir fait partager votre amour de la famille et de la communauté, le sacré de la terre, et de m’avoir emmenée si près de DIEU…

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25 réponses à J103 : ascension du volcan Imbabura : 4630 mètres, j’ai pleuré…

  1. Exceptionnel ! Exceptionnel grâce à ce que tu viens de vivre ! Exceptionnel grâce à ces gens qui ont l’air de respirer la gentillesse, grâce à ces images très belles et aux textes qui s’y collent !
    Vraiment je t’envie beaucoup Françoise !
    A bientôt pour d’autres émotions.

    • Francoise dit :

      Au lieu de m’envier prend ton billet d’avion… Tu as vu je t’ai mis les photos des prises, en Equateur c’est pareil… Merci de me suivre et de m’encourager… Bisous tout plein

  2. Et exceptionnel aussi par la performance, ça va sans dire !
    Muchos besos

    • Francoise dit :

      Ah bin oui car j’ai du faire marcher mon mental à fond… Mais qu’est-ce que je suis contente… Et aujourd’hui j’ai repleuré, ça devient une maladie…
      Bisous

  3. Jean dit :

    Bravo !
    Moi, j’avais pleuré au sommet du Mont-Blanc en admirant le lever de soleil sur l’arc alpin, en haut du Chimborazo en apercevant Guayaquil et à la cumbre de l’Aconcagua (sentinelle blanche en quetchua) en admirant les Andes, la pampa argentine, le Chili, Santiago dans sa brume et le Pacifique !
    L’avantage de nos âges, c’est que nous n’avons plus besoin d’aller faire les sommets en cachette des parents pendant leur sommeil !
    Bises de ton frère ainé à qui tu dois respect et considération.

    • Francoise dit :

      Ouf, je ne suis pas la seule à pleurer… Je viens encore de pleurer en atteignant la latitude 0° 0’0 »…
      Oué tu te rappelles quand on est allé au grand lac en prenant le passage dangereux au-dessus de Pont-de -l’Alp ? Et que pour y aller on avait qu’un vélo pour deux, on faisait un kilomètre en vélo, le vélo dans le fossé, on continuait à pied, l’autre prenait le vélo et ainsi de suite… On avait une pêche d’enfer et on le savait pas… Respect et considération mon frère ainé qui a atteint l’Acagongua, moi juste l’Imbabura… Mais quand même c’est un Dieu…

  4. Christ dit :

    Toujours de la souffrance mais toujours du plus beau et « chaud » à l’âme. Muchos besos

  5. Monica dit :

    Je reste sans voix, devant ces paysages grandioses habités par les Quetchuas, amoureux de leur terre, des sommets qui rapprochent du Dieu Imbabura. Que d’émotions tu as du ressentir, devant tant de beauté, de simplicité, tant d’humilité, et d’amour.
    Je comprends le flot de tes larmes au sommet du volcan.
    Besos

    • Francoise dit :

      Oui, beaucoup, beaucoup d’émotion et ce d’autant plus que je suis passé très limite grâce à un guide exeptionnel… Amoureux de leur terre est trop faible, la terre pour eux est sacrée et passe avant tout, le volcans sont Dieux, mais c’est pas juste pour faire semblant, c’est leur culture, leurs valeurs, je ne pourrai vivre dans leurs communautés, trop de règles…J’ai trop besoin de liberté d’indépendance et suis trop rebelle… Mais cette sacralisation de la terre c’est impressionnant, oui le mot est juste, impressionnant.
      Bisous Monica et que vaya bien

  6. Elodie dit :

    Bravo ! Chaque jour une nouvelle aventure, chaque jour de nouvelles rencontres (je remarque que tu as le don pour trouver des gens qui te bichonnent : massages,…). Maman, tu déchires !

    • Francoise dit :

      Aujourd’hui encore des aventures… J’arrive plus à tout écrire… Quand aux massages, j’ai cherché, trouvé, payé aussi, et crié aussi… Parce que je ne sais pas si tu connais le film où un grand noir masse je sais plus quel acteur comique connu, bin c’était ça en pire… Ca ne m’a rien fait sue les douleurs musculaires, en revanche sur la main c’est spectaculaire… Bon c’est pas ça encore mais c’est moins pire, quand au doigt elle m’a dit qu’elle pouvait rien faire mais qu’elle sentait quelque chose dans l’artculation P1P2, peut-être est-ce le tendon qui s’est rétracté, ce qui est sûr c’est que je n’ai plus d’extention, c’est soit le tendon, soit le nerf qui est sectionné, je verrai au retour pour trouver un bon chirurgien de la main sur Paris, parce que dans mon bled là j’ai donné…
      Bisous ma fille

  7. brigitte jotté de la touche dit :

    magnifique !!oui tu es bien une rebelle et reste comme cela !profites en de ta bonne nature qui te donne des ailes dans toutes ces difficultés sportives , c’est bien là que tu t’exprimes le mieux !
    merci pour le voyage ou tu nous entrainent , et moi je file m’enrouler dans » les nuages « de ces volcans amants que tu nous offrent en images ,,,, les nuages restent les refuges de mes reves artistiques ,, c’est moins spectaculaire , mais cela continue de me porter aussi haut!!!
    en tout cas , c’est bien bon de te voir aussi en forme .
    belle suite , je t’embrasse et mon Erable à la Béoux tire son sommet vers le ciel et te voit rencontrer Dieu sur des sommets de Merveille

    • Francoise dit :

      Oui j’ai enfin décidé de rester comme je suis, et si les autres ne sont pas contents et bin tant pis… Je prends toujours un grand plaisir à te lire… En fin d’après-midi à Quito il y avait une lumière fabuleuse, une lumière de Bretagne…
      J’ai eu des nouvelles de ton érable il va bien, paraît-il que c’est increvable ces bêtes là, comme sa nouvelle propriétaire…
      Bisous de l’hémisphère sud

  8. polycycle et vérocyclette jeuvoyageurs dit :

    Et maintenant attention de ne pas rester accrochée à la LIGNE DE L’EQUATEUR…Un pied dans l’hémisphère nord, l’autre dans le sud,
    savoureras-tu un « bizcocho » emmené de Cayambe. Et les « vraies » larmes du « vrai » passage de l’Equateur que tu as cru déjà franchir déjà
    seront-elles chaudes? Merci de nous faire revivre notre passage là en 2007…

    • Francoise dit :

      Je vous croyais en Equateur en ce moment… Où êtes-vous ? Bin j’y suis resté accrochée un moment à cette ligne… Oui elles étaient chaudes, les biscoco, pas les larmes…

  9. polycycle jeuvoyageurs dit :

    Techniques de manipulations inca.?..A découvrir encore et qui me stupéfièrent, kiné de formation,:, en 1992, le Senor AYALA, 93, quatre-vingt-treize, ans ( et pas retraité ,qui avait encore à donner)
    apès un long massage et de longs IR, manipula l’entorse du coude de ma compagne péruvienne qui avait dérapé lors des premiers tours de pédale à Iquique (Atacama chilien): une technique stupéfiante, puissante et douce de ce géant de 1m90 et 100 kgs bientôt centenaire

    • Francoise dit :

      Alors quand même mon dos ça ne m’a rien fait, les douleurs musculaires non plus, le doigt non plus, la main si, à moins que ce ne soit l’escalade ? Y a pas je suis une ingrate… Non quand même j’ai pris conscience qu’il était important que je fasse mes exercices de la main plus massages tous les jours… J’ai suivi vos conseils lesPolVero cyclo et cyclette, je suis passé par Cayambe et j’ai mangé les bicomachins chose… Où êtes-vous en ce moment ? Je suis à Quito et compte y rester au moins deux jours… J’espère quand même que l’on va se rencontrer… Bien viaje à los dos

  10. Enzo dit :

    Hola miss,

    Merci pour ta formule de reportage Photo + Petit texte, c’est très agréable à lire.

    Kisssss

  11. Jacques dit :

    Bravo
    Ici la vie est plus tranquille, mais on tente aussi de communiquer avec l’au-delà:
    https://picasaweb.google.com/lh/photo/DESqtkJABEvPMkefPPSHe7foRYK6m6wpcPKY_h1D0DI?feat=email
    Bises du frangin (l’autre!)

  12. GODARD Michel et Nicole dit :

    C’est le plus beau reportage que tu nous as envoyé! Tant par le texte que les photos très belles et qui expriment bien ton émotion.
    Chapeau madame! Et dire que ce dimanche nous étions presque chez toi sur les crêtes de Praloubeau et Boutarinard que nous avons redescendues jusqu’à ta maison!! Nous étions 8 Ours dont Jean-Pierre Belle, Cristie, Stéphane entre autres! Nous partons en vélo demain pour le Gard! Je t’embrasse

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