J146 : et bin oui, le Perou c’est le Perou…

Jeudi 16 juin 2011

Macara ( Equateur) – Las lomas (Perou)

Distance parcourue : 55,40 km
Vmoy : 13km/h Vmax :  52,6 km/h
Température : minima : 27°, maxima : 40°
Dénivelée positif : 461 m
Dénivelée négatif :  695m
Heures sur le vélo : 4H15’16 »
Départ : 10 heures 30
Arrivée : 16 heures 15

Résumé de la journée

  • Objectif :  le Perou
  • Conditions météorologiques : chaleur, soleil, puis couvert, impression que orage menace, pluie après mon arrivée
  • Etat de santé : ca va
  • Particularités de la journée : trop bien, une route roulante déserte et des gens accueillants, souriants qui m’encouragent, un paysage qui me plait

 

A 7 heures je suis prête, hier j’ai bouclé mes sacoches, mais avant de partir je veux savoir si ma carte bancaire est arrivée. On m’a dit que le courrier ouvrait à 8 heures, du coup je refais mes sacoches en en consacrant une à ce que je veux emmener avec moi pour aller a Cuenca si ma carte est là, histoire de ne pas rater LE bus de la journée. Puis va commencer une longue quête pour savoir si ma carte était arrivée ou pas. Hier à l’hôtel c’est la petite (et gentille mais pas douée) colombienne qui m’a répondu, j’ai perdu l’habitude de l’accent colombien et ne comprenait rien à ce qu’elle me disait, à la question « hay ou no hay » « tiene o no tiene », soit elle est là ou elle est pas là, vous l’avez ou vous ne l’avez ou vous ne l’avez pas la notification, répondez-moi juste par oui ou par non, et bien la réponse est des explications oiseuses auxquelles je ne comprends rien, finalement je craque, je demande l’aide de la vendeuse de minutes de téléphone qui se fait prier et finit par accéder à ma demande et pendant ce temps les minutes défilent et mes précieux petits dollars s’envolent et chaque dollar qui s’envole c’est un grain de riz en moins, une goutte d’eau potable en moins et une heure de sommeil en toute sécurité en moins, une minute d’internet en moins, et aussi l’impossibilité de faire ce que j’avais prévu, l’impossibilité de racheter un pneu, l’impossibilité d’aller chez le dentiste, l’impossibilité d’acheter les médicaments dont j’ai besoin, l’impossibilité toute bête de racheter de la crème solaire ou du répulsif pour les moustiques, l’impossibilité de téléphoner, voilà à quoi sert l’argent… Alors la petite colombienne elle finit par cracher le morceau, non ils n’ont pas la notification de ma carte, et elle donne deux numéros de téléphone où appeler, et voilà encore les minutes et les dollars qui dégringolent et la réponse que ils savent pas et que il me faut le numéro du courrier… Je lance un appel de détresse sur le net et je cherche a Macara la poste. Et bien dans cette ville de moins de 1km2 il me faudra bien une heure pour trouver, entre les ça n’existe pas ici et qu’est-ce que c’est que ça El correo del Ecuador et qu’on veut m’envoyer sur internet et que on m’envoie n’importe où et que je finis par trouver un tout petit bureau caché au fin fond de la petite ville et que la seule employée ne sait pas ce que c’est qu’un recommandé et que des timbres elle ne sait pas ce que c’est et que pour qu’elle téléphone elle à Cuenca j’ai du faire un vrai forcing, etj e finis par savoir que ma carte n’est pas arrivée, alors vite je me sauve, je retourne à l’hôtel et là nouveau choc ils sont en train de débarrasser ma chambre, mes sacoches étaient prêtes, une pas fermée, je râle quand même je dis que je n’étais pas partie, que ça ne se fait pas, ils me disent qu’ils ont fait ça pour s’avancer. Je n’ai pas le courage de revérifier que j’ai bien tout, je suis très en colère, surtout que avant de partir je vérifie que je n’oublie rien, partout derrière et sous le lit, ce qui au passage me permet de mesurer la couche de poussière et de découvrir des détritus laissés par d’autres, je me sauve en priant le ciel que l’on ne m’est rien dérobé… Le petit jeune qui m’aide à porter les affaires me demande en échange mon appareil photo, attends il rêve… Je lui demande si il peut vérifier le serrage de ma roue (hier j’ai inversé les pneus avant et arrière pour cause d’usure et je sais que ne n’ai pas de force, donc pour le serrage des roues c’est léger), là c’est moi qui rêve, vite je reprends les choses en main, ouf j’ai commencé par la roue avant (au passage tite Françoise t’as pas encore compris qu’il faut laisser personne toucher à ton vélo !)

Je sors de la ville, il n’y a plus rien jusqu’au « Puente International »

Pas de retour, non sauf si c’est pour trouver ma carte…

Alors avant le rio c’est l’Equateur, après c’est le Perou

L’avantage de passer par un endroit désert c’est qu’on ne fait pas la queue, l’inconvénient c’est qu’il faut faire attention et vérifier que tout est en ordre et même chercher où il faut aller, on peut passer la frontière sans faire les papiers mais ensuite bonjour les dégâts, j’ai rencontré à Quito un français qui a passé la frontière colombo-équatorienne le jour des élections, il n’y avait personne à l’émigration, il est passé quand même, pas de chance il a été contrôlé, peut-être est-il toujours à Quito en train d’attendre sa régularisation… Donc je fais très attention, je fais ma sortie, je me fais confirmer que pas de problème pour rerentrer et ressortir (si des fois ma carte bancaire arrive un jour  à Cuenca) Je m’informe où se fait l’entrée au Pérou, c’est de l’autre coté du pont, avant je trouve un œil pour me faire la photo d’usage (réclamée à cors et à cri par mon correspondant et ami du Dauphiné Libéré)

Je vois des hommes en uniforme, j’y vais, je trouve un peu bizarre qu’on m’envoie dans un autre bureau mais bon, je suis la seule, ça les occupe… Je me fais confirmer que je peux sortir et rentrer sans problème et là les choses commencent à se compliquer, j’ai le droit à 24 heures, puis à 4 jours, je ne comprends plus rien, je dis que je croyais que c’était 3 mois, je précise que pour faire mon aller-retour je le ferai en bus, là ça a l’air de les perturber un peu plus, attends je fais Caracas-Ushuaïa, un aller simple, pas le retour en bicyclette et là une question « Où est ma moto ? » « mais je n’ai pas de moto, je suis en bicyclette » « pour les bicyclettes pas besoin », et j’ai un éclair de lucidité « je ne suis pas à l’émigration ? », non, je suis à la douane, l’émigration c’est en face, un tout petit escalier en face.

Je recommence mon laïus, pas de problème pour sortir et rerentrer, non, j’ai la bonne idée de vérifier mon tampon sur mon passeport et je vois qu’il a écrit 60 jours, je ne craque pas, je garde mon calme, je dis que je ne comprends pas, que la durée légale est de 90 jours, je rajoute que je suis en bicyclette et que je ne peux traverser le Pérou en 2 mois, je ne précise pas et en plus à mon âge mais je l’ai pensé si fort qu’il a du l’entendre… Il me dit que comme je vais repasser, je lui explique que ma carte risque de ne jamais arriver donc j’en ferai refaire une au Perou, appel du supérieur, on met un coup de blanc sur les 60 jours et on réécrit 90 dessus, je demande si ils ne peuvent pas remettre un tampon, si ça va aller comme ça, bon ils l’écrivent en toutes lettres et bin dites donc, ça commence bien…

Et me voilà partie sur les chemins du Pérou… Lima est encore loin…

N’ayant pas non plus de carte routière, je photographie les panneaux pour essayer de me repérer, lesquels panneaux me confirment la rareté des villes.

Je revis un enchantement, la route est superbe et quasi déserte (au passage je suis sur la Panam, je vais y rester tant que je m’y sens bien et aussi il faut que je trouve une carte), le paysage d’enfer, la route va serpenter entre les montagnes puis rapidement devenir longue ligne droite qui monte et qui descend, la température à 37 sous le soleil m’est très favorable, elle chutera à 32 sous les nuages pour atteindre 28 en fin d’après-midi. Deux nouveaux ennemis apparaissent des mini-guêpes qui se collent sur moi dés que je tente de m’arrêter (et ce malgré la prise de vitamine B, la vitamine B dans la crème solaire et la crème repellente, du coup je m’arrête peu… Lle paysage se fait presque désertique, les maison maisons rares et les villages quasi absents, la végétation est presque exclusivement faite de résineux… Je crois voir des baobas…

Les chèvres ont remplacés les vaches… J’ai en ligne de mire une montagne pointue

Puis une autre parfois, la montagne avec l’orage qui menace devient oppressante, mais je reconnais que j’aime ça.

Tout n’est quand même pas si facile, sur la route il y a des obstacles( photo prise en roulant, je prends des risques…)

Un rio au fond d’une gorge sombre sert de lavoir à une famille

Je retrouve des arbres vus au Vénézuela, peut-être suis-je à la même latitude, dans l’autre hémisphère mais à la même latitude…

A la fin de la journée je vais sortir de la montagne

et arriver à la petite ville de Las Lomas, ville tout ensablée, pauvre, avec de drôles de taxi style moto-carosse ou pousse-pousse motorisé…

Et de jolies places colorées

La meilleure surprise du jour (meilleure encore que la bonne route et le paysage et la chaleur) ce sont : les sourires, les encouragements, les appels de phare et les klaxons gentils, les saluts de la main, je me crois presque de retour au Vénézuela et mon moral remonte en flèche. Les enfants aussi sont plus souriants et les chiens moins méchants, un va me courser dans une montée et abandonnera vite, trois me courseront plus violemment, l’automobiliste qui arrive en face les chassera à grands coups d klaxon…Je vois un bus, un seul, mais un quand même, que dans un sens, mais si j’en vois un c’est qu’il y en a, je pense à un éventuel retour à Cuenca… Je me suis arrêtée comme ça dans un rare village pour demander un peu comment c’était après et pour tester un peu et tout de suite j’ai senti la différence d’accueil, il y a des choses qui se sentent rien que d’un mot, d’un geste ou même d’un regard. Passé deux heures de l’après-midi je me dis qu’il faut que je m’arrête et que je mange et ce malgré le guêpes. Je me pose à la sortie d’un village, assise dans le fossé, de très jeunes filles passent et pouffent de rire à ma vue ( au passage elle pouffent de rire pour rien comme toutes les très jeunes filles du monde), je leur demande si c’est de voir une abuela pédaler qui les fait tant rire, bon les abuela ça mangent aussi, la glace est rompue, on rie. Arrive des mamans et leurs enfants puis de jeunes garçons, on parle, je réponds à leurs questions et en pose encore plus. L’orage, non il ne va pas tomber, juste en janvier et février, elles savent pas les dames que je suis une catastrophe ambulante ( je rappelle à ceux qui prennent la lecture en cours de route que plus catastrophe ambulante que moi y a juste un exemplaire, c’est mon petit-frère), que sur mon passage tombe les pluies torrentielles du siècle, que les volcans se réveillent, que la foule s’agite, que je suis même capable de faire tomber la pluie dans le désert le plus aride du monde (attendez le désert d’Atacama, vous allez voir…), d’ailleurs ce soir dans cette région sèche où il n’a pas plu depuis 4 mois, et bien croyez-moi si vous voulez mais il a plu… Et quand je suis allé en Syrie, sur mon passage le désert s’est recouvert d’herbe tendre… Oui, oui c’est vrai… Quand même je me sens rassurée sur l’absence d’orage car ça je  n’aime pas du tout, mais alors pas du tout. Je montre mes jambes transpercées, c’est pas le transperçage habituel, il n’y a pas le rond blanc, ce n’est pas non plus des piqûres de moustiques, je pense que ce sont les mini-guêpes, on me confirme ce sont des « turulas », dangereux ? Non. Ca transporte pas des maladies ? Non. Eux-aussi se font piquer ? Oui. Ouf là y a pas que moi qui est visée…Et les chiens ? Non ils n’attaquent pas. Je dois faire quoi ? Les ignorer ou avoir une pierre. Bon il vaut mieux avoir une pierre… Quand même on est au Pérou mais il faut pas trop rêver. Je leur dis le bonheur que j’ai à les rencontrer, je leur dis le bien que me font leurs sourires… Une fois avalés mes ships (les avant-dernières car ce soir je n’en ai pas trouvées) ma brioche, ma dulce del leche pas terrible, oui il y en a de meilleures que d’autres et mon eau je repars. Mon objectif était Le Pérou, mais comme mes jambes tournent bien, que la route est roulante, que je suis à basse altitude et même si je ne ressens aucun effet de l’altitude je vois bien que le rendement est différent quand on redescend et que tous les globules rouges accumulés s’agitent… Je me fixe un objectif de 50 km, ce qui va correspondre à une  arrivée vers16 heures et à partir de là je cherche un endroit sécurisé où dormir. Je pensais bivouaquer dans un hameau, mais voilà une petite ville avec hôtel, j’y vais, les bivouacs au bord d’une route déserte c’est pas forcement top top. Voilà les gens de l’hôtel encore en construction sont super sympas, la douche froide est plus supportable à 27° qu’à 15°, dans la petite ville il y a plus de boutiques internet que de boutiques d’alimentation, les besoins changent, bref c’est le paradis…

Au fait c’est facile d’aller au Pérou, à 10 heures 30 je partais, à 11 heures j’y étais avec les papiers à peu près en règle (le à peu près c’est pour le coup de blanc…)

Bisous tout le monde et encore merci de votre soutien.

Un merci particulier à Enzo pour le contact à Trujillo.

Des nouvelles de nos amis cyclos sur les routes :

Pierre Mandol est arrivé chez les kangourous, l’herbe est verte et le soleil brille, lui il a trouvé le truc, son objectif ce n’est pas un lieu en particulier c’est de suivre le soleil, mais la sagesse et l’intelligence ne sont pas donnés à tous…

Piet le belge est passé par la haute montagne, a bouffé du caillou pendant 150km…

Diego mon ami le colombien je sais pas où il est lui, son blog il est en projet, pour l’instant il croque la vie à pleine dents au sens propre et au sens figuré puisque l’objectif de son voyage est de recueillir les traditions culinaires…

Janodou je sais pas s’il continue de ronger ses freins… Le jour J est fixé…Arrivera très vite, avec un peu de chance il lui en restera un peu (de frein) pour les descentes vénézuéliennes qui bizarrement ont la même pente que les montées, je rappelle le qualificatif de la famille cyclo, les routes au Vénézuela sont « cruelles »

La famille cyclo a mis son blog à jour, la Colombie tient en une page et tout ou presque est dit, ça c’est du grand art… Mais quand même la maman cyclo elle fait autant de bêtises que moi, elle devait donner une conférence à l’alliance espagnole de Carthagene, coup de téléphone la veille pour régler les derniers détails, ils l’attendaient en Espagne, elle était à Carthagene, j’ai ri à en mourir…

Jean (pas mon frère) un autre Jean est en train de goûter à la pluie d’Irlande…

Et pour les autres que ceux qui ont des nouvelles m’en donnent…

Et pour Janodou, l’Equateur prise américaine (la blanche) ou parfois espagnole (la orange), première prise péruvienne (après les sourires bien sûr) la américaine…

Rebisous à tous

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6 réponses à J146 : et bin oui, le Perou c’est le Perou…

  1. Je retrouve la Françoise fonceuse, pleine d’humour et bavarde de la plume : c’est super et rassurant !
    J’ai bien compris l’importance des tampons lors des sorties de territoires et je vérifierai les 90 jours autorisés pour circuler.
    Tu n’es pas la seule à vanter la gentillesse des Péruviens.
    Reste pour toi tout de même le problème de ta CB qui va forcément se résoudre : j’en prends de la graine et ai déjà trouvé le moyen de planquer l’essentiel de survie dans une telle traversée. Corinne et Enzo me diront aussi comment mettre à l’abri argent, CB et moral.
    Je suis content Françoise de te retrouver pleine d’allant et à coup sûr en train de te forger une expérience d’enfer dans cette extraordinaire aventure humaine.
    Bravo à toi d’être arrivée dans ton 4e pays et d’attaquer ainsi la suite de ton parcours avec sans doute une plus grande sérénité dans la façon de gérer le bien comme le moins bien !
    Commentaires un peu décousus je l’avoue mais, tu l’as peut-être deviné, teintés d’encouragements qui te sont destinés bien sûr mais que j’adresse aussi à moi-même.
    A bientôt Françoise et bonne route

    • Francoise dit :

      Oue le desert et la rencontre de deux etres de lumier m’ont remise d’aplomb, attention si tu prends le chemin que je prends il y a vraiment attaque systematique des cyclistes, systematiques, pas risaue, necessite d’obtenir l’escorte de l police ou bus je te donerai tous les renseignemets, mes deux etres de lumier m’ont tout donne, je les remercie, je remercie aussi Enzo, et toi aussi, vos cartes sont imprimees, j’a huit litres ou plus de boisson et une tonne de nourriture pour affronter les 200 prochains km de desert, tout va bien

    • Francoise dit :

      Et j’ai oublie le principal, suis arrivee dams mon 4eme pays sans la moindre petite crevaison, parait-il qu’en Argentine il y a des epines si grandes qu’elles traversent le pneu de part en part…
      Bisous a toi

    • Francoise dit :

      Et sans crevaison mon 4ème pays, sans crevaison, à inscrire dans le livre des records, j’avais un peu peur après avoir interverti pneus et chambres à air, mais non ça tient, on fait la paire tous les deux, increvables…
      A inscrire aussi dans le livre des records la femme qui va plus vite que le courrier…
      Je parle pas du record du blablatage parce que là… Suis imbattable…
      T’en est à J moins combien ?
      Bisous à toi

  2. ARDUIN-BOREL Mylaine dit :

    La pluie m’empêche de m’occuper de mon jardin alors je lis tes aventures.
    Pourquoi tu avances dans ton périple pour après prends un bus, pour revenir sur tes pas?
    Vas tout de suite chez l’ami de (je crois) Enzo et après repart de plus belle.
    Je suis contente que ton moral soit au beau fixe, pense à ta santé. Elle te permettra de finir en beauté. Bisous Mylaine

    • Francoise dit :

      Parce que je suis butee de chez butee et je peux pas rester a attendre comme ca, donc j’avance et si un jour ma carte arrive, bus, ce qui risque d’etre moins rapide que le velo…

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