Mardi 12 juillet 2011
Paraiso (le Paradis), bivouac à 3542 mètres – bivouac à 4100mètres d’altitude
Distance parcourue : 26,26 km
Vmoy : 5 km/h Vmax : 55,7 km/h
Température : minima : 6°, maxima :22°
Dénivelée positif : 675 m
Dénivelée négatif : 103 m
Heures sur le vélo : 5H12’07 »
Départ : vers 8h30
Arrivée : tard, passé17 heures
Résumé de la journée
- Conditions météorologiques : froid, un peu de pluie, l’orage qui menace
- Objectif : avancer, trouver un endroit où dormir
- Etat de santé : bon
- Particularités de la journée : route plus facile, je traverse un altiplano, puis je vais en rebaver à mort pour monter à Shorey puis je vais planter ma tente à 41OO mètres d’altitude loin de tout..
Ce matin avant de partir je vais dire au revoir aux gens du restaurant, je demande à laver ma cuiller (collante de dulce de leche appelée ici manzana blanca alias lait concentré sucré chez nous), la dame me prend la cuiller des mains et va pour laver elle-même, je ne sais pourquoi je la suis, et je rencontre Anna. Anna a été mise sur mon chemin, je lui consacrerai un article. Lisez-le et aidez-moi à l’aider…
Bien sûr j’ai eu droit à ma dose de beau du matin…
Même que des fois il y a du surdosage…
Je ne mangerai pas le cochon, dommage, sauf pour la peau…
La piste est meilleure
Pendant de longs kilomètres je vais parcourir un altiplano, qui certes est alti(vers les 3500m), mais pas vraiment plano, ça monte et ça descend…
Toute vie ici est difficile…
Moi j’aime les grands espaces forts et puissants de la nature…
Ce n’est peut-être pas pour rien que j’habite une maison adossée à une falaise qui s’écroule… Je rappelle pour ceux qui n’ont pas suivi depuis le début que devant ce sont des montagnes aux formes voluptueuses, oui, on peut aimer tout et son contraire…
Parfois un bus passe…
Moi aussi je passe, au milieu du somptueux…
Je me crois sortis des difficultés, je pédale et ouvre grand mes yeux…
Ici un rio
Là peut-être des ruines d’irrigation précolombiennne…
Les nuages ne sont pas encore trop menaçants et puis de toute façon j’ai décidé d’en faire abstraction…
Même les camions ils font moins de poussière…
Et puis, et puis je vais en rebaver à mort…
La piste redevient épouvantable, sable, pierres ,graviers et même des fois de l’eau…
Et la pente est dure pour monter à Shorey petit village minier à 3800 mètres d’altitude, très, très pauvre, c’est sûr l’or du Pérou n’est pas ici…
A Shorey il y a un restaurant pour camionneurs ou travailleurs, je mange bien, j’ai un admirateur
Je reconnais que mon mode de transport est totalement inadapté aux pistes que je tente de gravir…
Je sors de Shorey, j’arrive à la bifurcation Cajabamba-Santiago de Chuco. A Carabamba il y a la mine, ne me demandez pas de quoi les gens ne savent pas…
Tous les camions, tous les bus vont à la mine, et les rares cyclistes qui ont fait le tronçon que je viens de faire c’est parce qu’ils voulaient joindre Cayamarca-Trujillo en passant par la montagne. L’inverse, venir de Trujillo et se jeter dans la gueule du loup, je crois qu’il faut être cycloabuelafluo pour le faire. me voici donc partie à l’inconnue sur cette piste. Il est 14 heures, je suis en haute montagne, l’orage menace, même pas peur… La piste n’est pas bonne et la pente est rude, je vais pousser.Je rencontre un homme, je n’ai pas bien compris d’où il venait, cela fait 9 heures qu’il marche, je lui donne de l’eau.
La mine (parce qu’il y en a une autre) va être présente, partout.
La piste devient meilleure et les pièges sont très biens signalés
Je continue, je continue, je continue, je ne rencontre personne, que la mine… C’est impressionnant, elle est presque à ciel ouvert, on dirait le front d’un glacier. Certains m’ont dit que c’était une mine d’or, d’autres d’argent, d’autres de trucs pour faire des choses, moi j’espère juste que ce n’est ni une mine d’amiante ni une mine d’uranium…
La protection autour de la mine est inexistante
Je continue à avancer, nous sommes au-dessus de 4000 et je vais rencontrer les travailleurs (et travailleuses) du froid…
Ils refont la route, j’en profite, un petit billard de terre battue, c’est aussi bon qu’un goudron bien lisse…
La route devrait être finie dans 6 mois, j’en doute… J’ai discuté avec les ingénieurs de la route, eux n’en doutent pas… Ils font 2km par jour, ont plusieurs chantiers, elle devrait même être goudronnée, je verrai juste plus loin, que oui, avant d’être goudronnée, déjà elle se casse. Dans ma tete ça va être comme cela jusque Santiago de Chuco, à Santiago de Chuco il y a une banque, je pense à Santiago de Chuco retrouver la civilisation et le goudron… Laissons mes illusions me bercer, en attendant je monte et il fait de plus en plus froid…
La végétation se réduit à de rares touffes d’une espèse d’herbe rêche. Je rencontre les ingénieurs de la route, où je vais, qu’est-ce que je vais, où ils peuvent m’emmener, c’est fou le nombre de gens qui veulent m’emmener quelque part, je crois que depuis que je suis partie j’aurais pu faire trois fois le tour de la terre sans donner un coup de pédale, et toujours je résiste, mais pour résister il faut expliquer…
J’avance au milieu du chantier, je crie pas la douche, pas la douche…
J’admire un superbe lac, amis ne vous y baignez pas, c’est un lac d’acide (pour la mine), je comprends les habitants de Pugno qui se font tuer pour empêcher l’implantation de la mine, que va-t-elle leur rapporter à eux ? A eux rien, que le défilé de camions, la poussière, le massacre de leur montagne et le droit d’aller s’user au travail pour quelques soles…
En tous cas les péruanos ne manquent pas d’humour…
Je vais dormir de l’autre coté du col, sauf que de col il n’ya , mais je ne le sais… Et oh ça se complique maintenant un nouveau danger, le verglas, je n’avais pas pensé à celui-là…
Je vous rappelle que nous sommes au-dessus de 4000, que l’orage menace, que l’heure tourne, et que la nuit ici tombe d’un coup, et derrière la courbe il y a une autre courbe, je commence à repérer les endroits plats, et puis je me dis que derrière le col ce ne sera pas mieux que là, je fais demi-tour et vais m’installer sur mon endroit plat. En face le gardien de nuit du chantier. je crains la circulation de nuit, alors je m’éloigne de la route, je fais du portage, mais camion il n’y aura pas cette nuit…
Le gardien de nuit me propose de garder mon vélo, d’accord, mais il faut d’abord enlever tous les clous, j’essaie de lui expliquer que je tente de battre le record mondial de 7500 km sans crevaison, j’ai dépassé les 6000, je garde espoir, il comprend pas bien.Lle lendemain j’aurai la surprise de voir les quatre planches en tas, mon vélo au milieu de mille clous et objets tranchants diverses…
Voilà, je suis seule au milieu de rien, je domine le monde (enfin presque), je suis heureuse…
Bien sûr j’ai le droit à mon petit coucher de soleil de la Cordillère…
A la viste de mes deux ingénieurs de la route…
Vous ne manquez de rien ? Vous n’allez pas avoir froid ? (le gardien de nuit juste avec ses quatre planches, ses couvertures et ses 25 soles par nuit il peut crever…). Ils me proposent à manger, mais c’est du poisson et que dans une heure, je réfute, je suis nase de chez nase, pas même la force d’écrire trois mots…
J’aurais le droit à des bonbons, et le lendemain bonbons et mandarines, j’en échangerai quelques unes contre du mais grillé avec mon prof de math, mais ceci est une autre histoire (notez au passage que je commence à faire des échanges, non je continue, j’ai échangé guide contre carte…)
La nuit va s’avérer très froide, la température va descendre à zéro dans la tente, pour la première fois j’aurai froid aux pieds, j’aurais du garder une des deux paires de chaussettes (oui aujourd’hui c’était deux paires de chaussettes aux pied, la en laine et la en poil de chat…)
Bonne nuit, bisous à tous
Apparemment, arrivée à ce stade de la parallèle du Pérou et à cette altitude, tu ressens l’hiver. Il semblerait que tu arrives à très bien gérer ce froid que ton corps redoute.
Allez vas-y Françoise, le courage te ressemble, il est à ton image.
Bises à toi
Je gère bien mais dans la journée il peut faire très chaud et j’apprécie… J’ai quand même racheté deux polaires et suis à la recherche d’un anorak. Les écarts de température entre nuit et jour pauvent aller jusqu’à 40°, c’est dingue, en fait le soleil est chaud mais l’air ne retient rien… besos